Les vins de GAILLAC

Les grands vins, les crus classés, nous en sommes tous friands et rares sont les rendez-vous passés avec de tels flacons qui soient désagréables. Ce que je leur reproche, c'est de ne pas pouvoir en boire tous les jours: mes finances n'étant malheureusement pas à la hauteur des envies de mes nasaux et de mon palais.
Il me faut alors me tourner vers des appellations moins prestigieuses (et onéreuses) pour accompagner mes soupers ordinaires avec ma tendre et douce Ronce: et là, les moments désastreux sont à craindre.

Naturellement, vous l'aurez compris, ce n'est pas à cause de La Ronce que je passe un mauvais dîner mais le responsable se trouve dans le verre. Il faut avouer que cela peut parfois agacer La Ronce qui se venge bassement sur son sommelier de mari et là, je vous assure, foi de Raoul, que je maudis le vigneron! Comme j'aime autant ma tranquilité que La Ronce, je me suis mis en quête de bouteilles pas trop chères avec de bons vins à l'intérieur: et c'est là que j'ai fait la rencontre avec les vins de Gaillac.

Cette appellation albigeoise traversée par le Tarn est centrée sur la ville de Gaillac. Je vous fais grâce des déails techniques que vous trouverez dans tout bon guide qui se respecte (nombre de communes concernées par l'AOC, terrains, cépages, etc...) pour vous dresser le cadre: on est dans le Sud et il fait chaud l'été. Alors, comme votre Raoul avec la chaleur a une fâcheuse tendance à perler (comme le gaillac!), je vous donne en mille mon lieu de prédilection pour me rafraîchir... non, je ne me jette pas dans le Tarn tel un hérétique cathare qui aurait bu une piquette de vin d'Arbois d'Henri Maire; je ne fonce pas non plus m'enfiler une bière glacée tel le batave nostalgique de son gouda natal. Ben, je vais dans une cave.

Et celle que j'ai découverte fut comme une révélation, croyez-moi elle vaut le détour. Dailleurs il faut en faire un puiqu'elle se trouve à la sortie de Gaillac (en venant d'Albi), dansune ancienne abbaye accolée à une église le long du Tarn. Cela s'intitule le musée des vins de Gaillac. Plus d'une cinquantaine de vignerons y envoient leurs bouteilles que l'on peut pratiquement toutes déguster (pas forcément le même jour) et acheter. Ce procédé est idéal pour découvrir une appellation sans être obligé d'ingurgiter des breuvages infects avec le sourire en expliquant que vous repasserez plus tard pour passer commande, mais que vous devez impérativement trouver une pharmacie tellement votre estomac crie pitié!

Au musée des vins de Gaillac, pas de chi-chi, on vous explique les étapes de la vinification, les proportions de chaque cépage pour les assemblages. Moi je suis tombé sous le charme (Chambertin!) des gaillacs doux et mes préférences vont vers les vignerons qui ne font pas d'assemblage mais qui utilisent uniquement du "Loin de l'oeil". Certes ils ne sont pas nombreux mais l'arôme du vin est franc évoquant la poire et le coing avec des touches de miel. J'ai craqué deux ans de suite sur le domaine de Laubarel de René Teulière pour les millésimes 98 (c'est mon préféré) et 99. Voilà un apéritif qui a du caractère pour un peu moins de 30 francs (4,5 €). Dans la catégorie supérieure, deux domaines tirent leur épingle du jeu en mélangeant avec harmonie les cépages. Tous d'abord le domaine Barreau avec sa cuvée "caprices d'automne" qui est en réalité une Vendanges Tardives. Les millésimes 97 et 98 sont tout simplement excellents pour environ 50F (<8€). Et puis avec la même philosophie de vendanger tardivement sans pour autant prétendre à l'appellation, j'aime bien le domaine des Cayroux de Nelly et Christian Jeanjean sur deux années, 98 et 99. Sur ces deux derniers domaines, la robe est plus dense tout comme la matière et je gage une capacité au vieillissement, surtout pour le domaine Barreau.

En ce qui concerne les blancs perlés, j'avoue ne pas être un adepte frénétique mais on peut remarquer le domaine Gayssou qui offre des vins bien faits pour environ 20F (3€).

Passons maintenant au plat de résistance, les rouges. Dans mes différentes périgrinations, j'en arrive à ranger les vins rougs de Gaillac dans 4 catégories. La dernière concerne tous ceux qui produisent des vins avec autant de conviction qu'un joueur du PSG en Coupe de la Ligue: les vins sont de vrais jets d'acide, sans intérêt. Je tiens à ne citer personne afin d'être sûr de ne pas recevoir leurs excédents en pleine poire. La troisième catégorie regroupe tous ceux qui sont davantage des commerciaux que des vignerons. Les vins produis sont stéréotypés, enveloppés de folklore et de mensonges. Vouloir faire croire au consommateur que le vignoble gaillacois est le plus ancien vignoble français puisqu'il a mille ans relève de la bêtise. C'est le prendre pour abruti qui est incapable de se dire que sous l'antiquité, "là où il y vait du Romain, y avait du raisin!" La cave de Técou est l'exemple de cette catégorie où le vin est trop cher (>50F, soit environ 8€), pas mauvais mais sans âme. Les deux autres catégories sont de loin les plus intéressantes: il y a les traditionalistes qui produisent des vins charpentés et les audacieux qui produisent des gaillacs malicieux et généreux.

Chez les anciens j'ai bien aimé le château de Rhodes de la famille Assié ainsi que le château Terride. Chez les magiciens du pressoir je suis un adepte du Mas Pignou cuvée Mélanie en 95 surtout, de Jacques et Bernard Auques. Le domaine d'Escausses cuvée la vigne blanche 98 est un monstre de concentration et devrait être en harmonie avec du sanglier aux châtaignes. Pour terminer le palmarès, le me dois de conclure sur le domaine Vaysette qui est le plus complet sur toute la gamme des vins de Gaillac en blancs comme en rouges, avec le rouge comme locomotive.

Rares sont les personnes qui n'ont pas été séduites par les vins de Gaillac, alors lancez-vous dans la découverte et si vous avez un souci, oubliez-le !

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