L’ HARMONIE DU TAO

 

 

"A ce moment même, comme vous marchez, restez debout ou assis, répondant à toutes les situations et vous mettant en relation avec les gens, tout, tout est le Tao."

( Ma-Tsou, maître chan majeur, 709-788 )

 

 

1- Premièrement est le Tao, et le Tao est auprès de Dieu, et Dieu est le Tao.

2- Celui-ci est primitivement auprès de Dieu.

3- Tout a été engendré par Lui, et rien n’a été engendré sans Lui.

4- En Lui est la vie, et la vie est la lumière des Hommes ( anthropon ).

5- Et la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas avalée.

6- Naquit un Homme ( anthropos ), envoyé de Dieu, du nom de Jean ( Iohanân) ;

7- Celui-ci comme témoin ( martyros ), pour témoigner au sujet de la lumière, afin que tous aient foi par lui.

8- Il n’était pas la lumière, mais témoigna de la lumière.

9- Cette lumière était authentique, elle éclairait tous les Hommes (anthropos ) par sa venue dans le monde ( cosmos ).

10- Elle était dans le monde ( cosmos ), et le monde était engendré par elle, et le monde ne l’a pas connue.

11- Elle est venue chez ses sujets, et ceux-ci ne l’ont pas reçue.

12- Mais à ceux qui l’ont reçue, Elle a donné le pouvoir d’être engendré de Dieu, eux qui ont cru en son Nom.

13- Lesquels sont nés non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté d’un homme ( andros ), mais engendrés par Dieu.

14- Et le Tao est né dans la chair, et est venu habiter en nous, et nous avons vu sa gloire, la gloire du Fils unique du Père, emplie de grâce et de Vérité.

 

( Jean I ; 1-14. Traduction inédite )

 

 Lorsque le Professeur John C.H. Wu, catholique Chinois, traduisit l’Evangile selon Jean en chinois, il rendit le terme grec Logos par le terme Tao. En Chine, le terme Tao apparaît dans le classique Tao Tê King attribué au sage Lao Tseu qui aurait vécu au V-ème siècle avant notre ère.

Au fil du temps, il apparaîtra que le Tao désigne à la fois :

 

- Le principe transcendant, insondable qui préside à toute chose dans l’univers,

source de toute existence.

- Le principe éthique, la vérité auxquels le sage doit se conformer par Wu-wei, la

quiétude créatrice, l’acte contemplatif taoïste par excellence qui débouche sur

l’action juste.

- La voie, le chemin dans un sens tout à la fois philosophique, éthique, spirituel

et religieux.

 

Au cours des siècles, le taoïsme va se donner comme but le retour à la Source (Fu) qui est communion avec le Tao. Il s’enrichira de pratiques énergétiques diverse,véritable alchimie interne ( Nei-tan ) qui culmine dans des pratiques méditatives très profondes, dont le bouddhisme Chan est une des floraisons les plus admirables.

 

Le Prologue de Jean est à la fois l’introduction à l’ Evangile du même nom, son résumé, et la clé qui permet de comprendre le sens réel et profond de l’aventure de Jésus, de l’ Incarnation du Christ.

Il renvoie au premier chapitre de la Genèse ( Gn I ; 1-3 ), qui décrit le fondement du cosmos. Il renvoie aussi à la Chute ( Gn III ) : l’ Anthropos, appelé à la communion divine, se révèle incapable de suivre le Tao et renie l’ineffable vérité.

La Genèse nous rappelle quelles en sont les terribles conséquences : la rupture de l’harmonie, la maladie et la mort pour l’Homme. Jean l’ Evangéliste semble même sous-entendre que c’est le cosmos dans son ensemble qui se détourne de la lumière.

Comme le dira plus tard Saint Maxime le Confesseur, au sixième siècle de notre ère, c’est l’univers tout entier qui en est affecté : la matière s’épaissit, le temps se modifie.

 

Les taoïstes considéraient la réalité sociale comme le produit d’une humanité dévoyée, en rupture avec le Tao. C’est au déclin du grand Tao que l’Homme a dû inventer les vertus confucéennes (piété filiale, honnêteté, loyauté, vertu, humanité…) et ce afin de tenter de corriger artificiellement une déviation primordiale, originelle. L’ Homme a alors perdu toute spontanéité, qui est vertu divine, au profit d’un ordre social artificiel et en fin de compte aliénant.

Les codes de la vie mondaine ont fait de l’ Homme un être dont la vie psychique est obnubilée par des stratégies de survie dans un monde de plus en plus complexe et de plus en plus réglementé. Faisant référence à un temps ancestral où les Hommes suivaient le tao et où leur spontanéité n’était pas entravée par un système légaliste inflationnaire et des guerres répétées, les taoïstes prirent souvent le parti de se retirer du monde et installèrent leurs monastères dans les montagnes ( V siècle après JC ).

Pour les taoïstes, le Shen Jen, l’ Homme spirituel, réalisé, ou Homme véritable – le sage ou le saint – est celui qui a réalisé le Tao. Il vit en harmonie avec Lui. Tout son être exprime la vérité intérieure, qui est la même que celle qui meut les planètes et le cosmos tout entier.

 

LES ARTS TAOÏSTES

 

 La redécouverte du Tao se traduit par un retour à l’harmonie. Cette pacification salvatrice s’étend à tout son être sur les plans corporel, psychique et spirituel. Cette harmonie s’étend à tous les corps, sociaux ou cosmique.

Concrètement, en Chine, le Tao a trouvé ses expressions dans des arts variés :

 

- Arts martiaux : Kung-fu de Shaolin, monastère taoïste puis chan ( Bodhidharma, premier patriarche, y resta en méditation neuf ans ) ; Taï Chi Chuan, dit aussi Kung-fu interne.

- L’ Énergétique : cycle des cinq éléments appliqué à la médecine et à la géobiologie. En particulier :

- Des exercices de santé ( Qigong, Daoyin …)

- Digitopuncture ( shiatsu au Japon )

- Moxas ( devenu plus tard acupuncture )

- Le Feng Shui : la géobiologie taoïste traditionnelle.

- Les yogas sexuels : ils ne sont pas usités dans toutes les écoles. Ils sont liés à

l’alchimie interne, qui correspond à la spiritualisation des énergies les plus

corporelles de l’ Homme.

- La calligraphie.

- L’art du thé ( Cha-shu ).

- La poésie ( haïku dans le Zen japonais ).

- La lecture symbolique de la destinée humaine ( le Yi king ).

- L’art de gouverner : le plus difficile à cerner de tous. Comme pour la plupart

des autres arts, l’action juste doit jaillir de la méditation, selon le principe

intraduisible de Wu-wei. Le Tao Tê King fait souvent référence à cet art.

 

Si les pratiques de la guerre

Peuvent devenir un art, Bushido,

L’art de gouverner existe aussi.

Au moment de laisser le monde derrière lui

Et d’entrer dans les montagnes,

Le Grand Sage le calligraphia en forme d’énigme.

 

Ces arts taoïstes n’ont vraiment de sens que s’ils s’enracinent dans une pratique sérieuse de la méditation. Enseignés isolément, ils ont une fâcheuse tendance à devenir soit des techniques de combat ou des pratiques de compétition pour les arts martiaux, de vagues croyances superstitieuses dans le cas du Feng Shui ou du Yi king, jouissance vulgaire pour les pratiques à caractère sexuel ou hédonisme dans les thérapies d’influence orientale. Ils risquent alors de dégénérer en l’instrument et l’objet du culte de soi, à l’opposé de l’authentique Tao.

Les arts taoïstes trouvent au contraire leur pleine signification lorsqu’ils sont remis dans une juste perspective spirituelle. Ils sont alors l’actualisation d’un état spirituel, son intégration et son développement dans le mouvement et dans l’action.

 

 LIENS

 

 Depuis 1911, le Taoïsme a subi en Chine des conditions de transmission de plus en plus difficiles, et l’on a craint ces dernières décennies qu’il ait pour ainsi dire disparu.

C’est dire si, en dehors de la tradition du Zen qui est issue de la synthèse du bouddhisme Mahayana et du Taoïsme, il est difficile de trouver un interlocuteur valable à la fois sur le plan philosophique et sur celui de la pratique. Le lecteur trouvera donc avec les liens proposés ci-après une sélection de quelques bons sites concernant le Taoïsme, auxquels il pourra se référer en toute confiance. Nous ne saurions trop lui recommander par ailleurs de se méfier des imitations, car en la matière tout ce qui brille n’est pas de l’or. Ici aussi les faux prophètes sont légion.

 

TRS : Association pour la restauration du Taoïsme en Chine. D'éminents universitaires y sont associés. Une référence.

Sanyuan

Dragon Céleste

Dojo du Centre

 

En 1968, le Pr Lee Beng Tjie, professeur de philosophie à l'Université de Singapour, confiait au moine trappiste américain Thomas Merton, grand admirateur de Lao Tseu et de Tchouang Tseu, qu'il avait du mal à faire comprendre la pensée de ces deux auteurs à ses étudiants asiatiques, formés par la dialectique occidentale.

A voir :

Lire Lao Tseu aujourd'hui : page chinoise sur la redécouverte de la philosophie du Tao dans certaines universités de Taïwan.

 

Taoïsme pour adolescents : Le Tao Te King commenté par des adolescents. Pages sur l'apport du taoïsme à la vie d'un adolescent : vie quotidienne, vie du corps... Utile, sérieux et, ce qui ne gâche rien, joliment réalisé.

 

Nan Huai-chin : page sur un des derniers grands maîtres taoïste et Chan (Zen) chinois encore en vie. Sa réputation ne cesse de croître à Taïwan où il enseigne depuis 1947. Vit actuellement à Hong Kong.

 

Pour joindre l’auteur de cette page Web : Wu-wei

 

Sur le Taiji en tant que représentation symbolique de la dynamique Yin/Yang : Taiji.