84 % des personnes dépressives fument

Les états anxio-dépressifs
Pr. G. Lagrue


Les liens entre état dépressif et tabagisme sont maintenant bien établis.  Chez les sujets déprimés, le tabagisme est très fréquent, retrouvé dans près de 80% des cas ; il est le plus souvent très important avec forte dépendance.  Inversement, chez les fumeurs très dépendant, la notion d'antécédents dépressifs est trois ou quatre fois plus fréquente que chez les non-fumeurs.  Chez ces fumeurs l'arrêt du tabac est toujours difficile à obtenir et le syndrome de sevrage est très intense, avec fréquemment dans les semaines suivant l'interruption une reprise du tabagisme souvent motivée l'aggravation de l'état dépressif.
Le traitement de substitution nicotinique a totalement modifié notre approche du sevrage tabagique il permet de contrôler de façon très remarquable le syndrome de sevrage aigu ; cependant son efficacité est moindre sur les troubles liés aux effets psycho-actifs de la nicotine ; des syndromes anxiodépressifs peuvent survenir, en particulier en fin
de traitement ou lors de la diminition des doses.
La population des fumeurs consultant en tabacologie s'est modifiée depuis 1992, date de la mise sur le marché du timbre nicotinique.  Les fumeurs moyennement ou peu dépendants et indemnes de troubles psychopathologiques ont alors réussi à arrêter avec l'aide de ce traitement ; les autres très dépendants, à forte consommation ont progressivement créé un « noyau dur » de fumeurs à très haut risque, fréquemment atteints de troubles psychopathologiques et qui ont très souvent échoué ou rechuté, en particulier en raison de la survenue de syndromes dépressifs.  E est donc nécessaire, dès la consultation initiale, de rechercher systématiquement l'existence d'un trouble psychopathologique latent ou plus ou moins patent par :
-une étude des antécédents familiaux et personnels ; tout épisode dépressif antérieur doit être pris en compte ;
-une analyse des troubles survenus lors des tentatives antérieures d'arrêt
-une pratique d'auto-questionnaires, tels le H.A.D. (Hospital-Anxiety-Depression score) et le B.D.I. (Beck Depression Inventory) dans sa forme abrégée en treize questions ;
-en cas d'anomalies de l'un de ces éléments il faut avoir recours à un entretien structuré tel le « Mini-interview » basé sur les critères du D.S.M. IV.
Chez les fumeurs ayant cette association « état dépressif-dépendance tabagique » l'utilisation simultanée du traitement nicotinique et d'un antidépresseur sérotoninergique permet d'obtenir l'arrêt du tabac sans que ne se produise une décompensation anxiodépressive, avec atténuation très nette du syndrome de sevrage.  Ces faits ont conduit certains auteurs à proposer l'emploi des psychotropes sérotoninergiques comme traitement de la dépendance tabagique ; ces indications nouvelles sont à l'étude ; les résultats préliminaires du bupropion sont prometteurs.
Ainsi, il n'y a pas de modalités uniformes pour le traitement de la dépendance tabagique ; les situations observées sont très diverses d'un fumeur à l'autre et une évaluation initiale est toujours indispensable, afin
de préciser la nature et l'intensité des dépendances, de déceler les comorbidités psychologiques souvent associées et de pouvoir proposer à chaque fumeur une aide adaptée et spécifique à ses propres troubles.  Les antidépresseurs constituent un élément très important chez certains fumeurs pour permettre un arrêt du tabac qui n'avait jamais pu être obtenu autrement ; mais il serait abusif de généraliser cette indication à l'ensemble des fumeurs, même pour ceux ayant une forte dépendance nicotinique.

Pour nous contacter :

Téléphone : 01 64 93 95 25 répondeur
Télécopie : 01 64 93 95 25
Messagerie : tabacologie.@libertysurf.fr