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GOD SAVE THE CRICKET



By MATTHIAS GURTLER
Article paru dans Sud-Ouest le 23 août 1999


C'est un coin d'Angleterre en plein Périgord Blanc, que les visiteurs peuvent découvrir à la sortie de Saint-Aulaye. Sur ce champs encadré de tournesols et de meules de foin, se défoulent une vingtaine de Britanniques de tout âge : ils jouent au cricket. Wynford Hicks vit ici depuis trois ans, il a toujours pratiqué ce sport et ne concevait pas de l'abandonner sous prétexte d'avoir traversé la Manche. "Ici c'est idéal pour le cricket, explique-t-il, il fait souvent beau et il existe de grandes étendues pour jouer". Mais Wynford ne s'arrête pas à la simple pratique dominicale de sa passion, il souhaite développer son sport dans le département.

"Quand je suis arrivé, il a fallu reconstruire un club et trouver un terrain" se souvient-il. Pour ce qui est du club, ce ne fut pas très difficile car la forte communauté anglaise de la région permit de gonfler rapidement les effectifs. Aujourd'hui l'équipe de Saint-Aulaye compte une vingtaine de joueurs de tout âge.

Un chiffre qui augmente, l'été venu. "Pendant les vacances, beaucoup d'amis anglais viennent nous rendre visite et jouent avec nous" explique Wynford. La tâche fut plus difficile pour trouver un terrain.

UN CHAMPIONNAT A CINQ

En effet le cricket demande beaucoup d'espace. "Au début la municipalité nous a prêté le terrain de football, mais c'était trop petit car ce sport se déroule sur un terrain ovale" se souvient-il. Alors Wynford a trouvé une solution, il a acheté un champ, qu'il a lui-même transformé.

Wynford n'est pas un cas unique en Dordogne. A Saint-Astier, c'est également un particulier qui a acheté un terrain pour jouer. A Damazan (Lot et Garonne), c'est dans un champ près du camping municipal, que les joueurs tapent la balle. Car la passion se développe dans tout le Sud-Ouest. Un championnat a ainsi été créé il y a quelques années.

La Dordogne avec trois représentants (Saint-Astier, Saint-Aulaye, Eymet) profite de ce fort contingent anglais. Ces équipes affrontent également leurs homologues de Bordeaux et Damazan. Et même si cette compétition pourrait avoir des relents de joutes nostalgiques voire folkloriques, il n'en est rien. " l'ambiance reste toujours familiale, cependant les parties sont acharnées. On ne se fait pas de cadeaux!" explique Wynford.

GERARD
EN EQUIPE DE FRANCE

Cet engouement, les Anglais de Dordogne aimeraient le voir partagé par les Français. " On ne cherche pas à s'isoler. Nous souhaitons au contraire ouvrir notre jeu aux Français " insiste Paul également installé ici depuis peu. Cet effort de communication et d'ouverture, Wynford le vit au jour le jour. " Cela fait deux ans que je fais de l'initiation au collège de Saint-Aulaye. Mais il y a beaucoup de règles et cela demande beaucoup de pratique ".

Le cricket est en effet un sport assez complexe au niveau des règles. " On y joue depuis des siècles chez nous, au fil du temps ils ont sans cesse rajouté des règles, explique Mally, venu en Dordogne pour les vacances. C'est un peu comme le Base-Ball en plus alambiqué... en plus british, quoi !

Mais l'exception française existe aussi dans l'univers du Cricket. Gérard Petit a 16 ans. Il entre au lycée à Bordeaux et joue dans l'équipe de Saint-Aulaye. Il a longtemps vécu en Australie, c'est là qu'il a appris à jouer (L'Australie est championne du monde). " Je ne parle jamais de cricket à mes copains, ils préfèrent le foot. J'aime venir ici et puis ça me redonne l'occasion de parler anglais ". Gérard est un peu le chouchou de l'équipe. C'est le plus jeune, c'est aussi le plus prometteur car il a intégré l'équipe de France. " Je ne suis encore que remplaçant, mais je progresse vite. Notre championnat est faible et dans le Nord du pays il y a beaucoup de bonnes équipes ".

Samedi après-midi, Gérard s'est alors entraîné avec son équipe. Sur le côté du terrain, les femmes des joueurs font office de supportrices. " Je suis venue voir mon mari. Quand il a su qu'on jouait au Cricket ici, il a absolument voulu y passer ses vacances. Ca tombait bien car on devait de toute façon aller dans le Sud-Ouest ".

On est certes encore bien loin des ambiances des stades. Les vestiaires ne sont que des caravanes, le terrain d'entraînement qu'une petite cage perdue dans les tournesols... mais même loin de Londres les traditions sont respectées. God save the Cricket!

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