Enquête sur les récidives de

Lombo-sciatiques opérées.

( Kinésithérapie Actualité Avril 1998 )

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J. Curraladas

Les lombalgies touchent 80% de la population dans notre pays .Elles représentent 5% des accidents de travail et 20% des arrêts de travail en France. Qualifiée de  " Fléau social "  par de nombreux auteurs, la lombalgie a des conséquences socio-économique importantes dans le monde du travail

En France , c'est près de 12 millions de journées de travail perdues et cela représente un coût pour le système de protection sociale estimé à près de 8 milliard de francs chaque année .

Aux Etats-Unis , elle est l'un des problèmes de santé le plus coûteux dans la tranche d'âge des 20 à 50 ans. Elle représente chaque année un million de journées de travail perdues et représente 20 % de tous les accidents du travail. En Suède elle est à l'origine de 12 % de la totalité des arrêts de travail .

En Grande Bretagne, 14 % de toutes les indemnités pour maladie et invalidité. L'absentéisme dû aux lombalgies est en augmentation récente et atteint des proportions épidémiques dans certains pays. En Suède, on est passé de 1% en 1970 à 8% en 1987. En Grande Bretagne, les journées de travail perdues ont doublées entre 1987 et 1992. Le nombre de journées d'arrêt de travail pour lombalgies par an est estimé à 4 millions au Pays-Bas, à 10 millions au Canada, à 16 millions en Allemagne, à 20 millions aux Etats-Unis, à 33 millions en Grande-Bretagne et à 28 millions en Suède. Les plaintes concernant les lombalgies ont augmenté de 17% dans les dix dernières années en France et malgré l'unanimité de tous , la prévention reste encore un objectif à atteindre.

 

 

 

Ce travail fait suite à l'enquête menée sur les patients opérés d'une cure de hernie discale intitulée :" Enquête chez les lombo-sciatiques opérées ". (Kinésithérapie Scientifique n°361 Nov.1996 ).

L'étude à été menée dans le service de Neurochirurgie du CHU Henri Mondor. Elle concerne 51 patients lombosciatalgiques opérés pour une seconde cure de hernie discale( L5/S1 , L4/L5 , L3/L4 , isolées ou associés ). Elle s'est déroulée d'avril 1996 à mai 1997 . Les questions sont posées lors du premier lever du patient à J1 post opératoire .

1/ La technique opératoire: Sous anesthésie générale, patient intubé, ventilé en position génu pectorale. Incision cutannée verticale médiane centrée sur l'espace interépineux concerné , incision para médiane de l'aponévrose puis désinsertion musulo-aponévrotique exposant l' espace interlamaire . Le ligament jaune est désinséré de la lame supérieure puis enlevé dans le cas ou est associé un récéssus latéral étroit (compression osseuse sur la racine ). L' abord sera agrandi latéralement aux dépends de l'articulaire , seul moyen d'exposer et de dégager la racine correspondante.

Après avoir bien individualisé la racine et bien exposé la hernie , le ligament vertébral commun postérieur est ouvert et le disque enlevé et cureté au maximum de la technique. Fermeture étanche de l'aponévrose sur un exudrain aspiratif qui sera maintenu pendant 24h et fermeture cutanée en deux plans.

 

 

 

 

2/ Les résultats

Le sexe et l'âge .

Dans cette étude, les hommes sont toujours plus nombreux que les femmes. Avant 30 ans, les récidives sont très faibles ( 2%) et c'est entre 30 et 60 ans que le nombre de secondes interventions est le plus important avec un pic dans la tranche des 40/50 ans qui représentent 43% des patients opérés. ( Figure 1 et 2 )

 

( Figure 1 )

 

( figure 2)

 

 

 

   

Les Accidents du Travail.

Seulement 7 personnes sur 51 étaient en accident de travail soit 14% . Ce chiffre est exactement le même que pour les AT de la première étude. Les ouvriers sont toujours la catégorie professionnelle la plus touchée ( figure 3).

( figure 3)

Le siège des lésions.

Le siège des lésions lors de la récidive, dans cette population de lombalgiques étudiés , est pour 51% situé en L4/L5 , pour 41% en L5/S1 et 8% sur plusieurs niveaux rachidiens

( figure 4).

( figure 4)

 

 

 

Lors de la première intervention ,il se situait pour 33% en L5/S1 , les lésions en L4/L5 représentaient 53% des opérations, 4% en L3/L4, et 10% sur deux disques intervertébraux.

(figure 5)

(figure 5)

Les catégories socio-professionnelles.

La catégorie des ouvriers est toujours la plus atteinte avec 30% de récidives , suivie des retraités avec 21% et les employés de bureau avec 18%. (figure 6)

Dans la première étude , les ouvriers représentaient 23% ,les employés de burau 15%, les retraités 11% et les cadres 10% pour une première intervention chirurgicale.

Ce sont donc les mêmes catégories professionnelles qui récidivent à peu près dans les mêmes proportions. Les cadres auraient tendance à moins récidiver .

(figure 6)

 

 

Date de la première intervention.

Un nombre important de patients ont récidivé entre

la 5 ème et la dixième année (36%). (figure 7)

Entre deux et cinq ans, ce sont 16% de récidives , mais le chiffre de 22% de seconde intervention dans la même année est assez surprenant et doit faire réfléchir. Parmi ces patients qui récidives au cours de la même année, 73% d'entre eux n'ont jamais repris leur travail entre les deux opérations.

 

(figure 7)

48% des patients opérés ont donc récidivé dans les cinq ans après la première intervention.

 

 

 

 

Reprise du travail après la

1 ère intervention .

La fourchette de dates de reprise de l'activité professionnelle après la première intervention se situe entre trois et cinquante six semaines.

Entre les deux interventions , c'est quand même 20% des patients qui n'ont jamais repris leur activité . (figure 8)

 

(figure 8)

 

La durée de l'arrêt de travail en post-opératoire la plus fréquente se situe entre 8 et 16 semaines

( 32 % des patients) alors que 28% d'entre eux se sont arrêté seulement de 3 à 8 semaines. (figure 9)

(figure 9)

 

Nature de la seconde intervention.

Dans 66% des cas, la cause de la récidive est une hernie discale, 18% de la fibrose péri radiculaire et 16% une autre cause ( souvent un récéssus étroit.). ( figure 10).

( figure 10).

 

3/Les questions posées:

 

Votre poste de travail actuel est -il :

Le même qu'avant la première opération, le même aménagé, un autre?.

Pour 66% des patients interrogés, le poste de travail reste le même qu'avant la première intervention, 27% ont changé totalement de poste de travail et seulement 7% d'entre eux ont vu le leur aménagé . ( figure 11).

 

( figure 11)

 

Qu'avez-vous fait après la première intervention?

Rien (pas de soins particulier), des soins de kinésithérapie ( plus de 10 séances de massage et rééducation), une information d'Ecole du Dos, des cours d'ergonomie dans l'entreprise.

 

 

( figure 12)

 

La lecture du graphique est malheureusement trop simple, en effet, les réponses montrent que seulement 35% des patients opérés d'une première cure de hernie discale lombaire ont effectué des soins de kinésithérapie post-opératoire ( Il n'a pas été demandé au patient de quel type de rééducation et s'il s'agissait de massage seul, de rééducation posturale, musculation, étirements, ect..). (figure12)

Mais 65% d'entre eux répondent n'avoir éffectué aucun soins particulier après leur première intervention. Il n'a pas été prescrit de kinésithérapie, ni de cours d'ergonomie et d'information sur l'école du dos!!

 

 

Depuis quand souffrez-vous?

La douleur est-elle permanente depuis la première intervention, depuis six mois, un an, plus?

( figure 13)

Une partie importante des patients de cette enquête souffrait depuis six mois avant de tenter la seconde intervention ( 43%) , mais pour 33% d'entre eux , la douleur était permanente depuis leur première opération. ( figure 13)

Parmi ceux dont la souffrance était permanente depuis leur première intervention , 76% n'avait pratiqué aucun soins post-opératoire ( à part la prise d'anti-inflammatoires et d'antalgiques. Quand la douleur remonte à six mois, c'est 55% qui n'ont effectué aucun soins , puis 57% quand la douleur est présente depuis un an et 80% quand elle dure depuis plus d'un an. ( figure 14)

( figure 14)

 

 

 

Avez-vous repris votre sport après la première intervention?

Seulement 24 % de patients disent avoir repris leur sport après la première intervention contre 76% qui ne l'on jamais fait. ( figure 15) Les délais de reprise de l'activité sportive varient de 4 s à 54 semaines. Les sports pratiqués sont variés.

 

( figure 15)

4/ Discussion /Conclusion.

Les récidives des lombo-sciatiques opérées représentent plus de 20% des interventions pour hernie discale chaque année. Lors de la première comme de la seconde intervention, il n'a pas été prescrit de travail de rééducation et il semble étonnant qu'aucune prise en charge d'éducation et de prévention des récidives (cours d'ergonomie dans l'entreprise, école du dos) ne soit systématisée après la première opération .

Il est remarquable qu'un pourcentage aussi important de patients (20%) n'ait jamais repris leur activité professionnelle entre les deux interventions. Parmi ceux-ci 94% n'ont jamais effectué de soins de masso-kinésithérapie.

Il serait intéressant de calculer le coût que cela représente pour le régime d'assurance maladie ... La prescription de quelques séances de kinésithérapie à visée de retonnification musculaire , d'éducation posturale et d'étirements des éléments musculo-ligamentaires du plan postérieur ne pourraient -elles pas modifier ces données?...( Seule une étude menée en collaboration avec les médecins prescripteurs et les kinésithérapeutes de ville ,avec un protocole précis de rééducation, pourrait nous apporter la réponse.).

 

( figure 16)

Les récidives s'effectuent toujours pour un fort pourcentage dans les cinq années suivant la première intervention et toujours sans soins de masso-kinésithérapie...

 

La tranche d'âge la plus touchée est toujours la tranche des 40/50 ans avec en général une musculature abdominale faible et une accentuation des courbures rachidiennes ainsi qu'un excès de poids. Il semblerait donc logique de mettre en place un protocole post-opératoire dès la première intervention ( mais aussi en aval de celle-ci...) pour rééquilibrer la morphostatique de ces patients lombalgiques et limiter les risques de récidives.

Ce protocole de rééducation devrait être élaboré par le chirurgien et confié au patient lors de sa sortie de l'hôpital . Il pourrait comporter par exemple :

Une séquence antalgique avec massages décontracturant de la musculature para vertébrale et physiothérapie antalgique.

Une séquence musculaire à type de retonnification du plan abdominal.

Une séquence posturale d'étirement des plans postérieur et antérieur ( rachis et des deux membres inférieurs.).</PY"Une séquence antalgique avec massages décontracturant de la musculature para vertébrale et physiothérapie antalgique.

Une séquence musculaire à type de retonnification du plan abdominal.

Une séquence posturale d'étirement des plans postérieur et antérieur ( rachis et des deux membres inférieurs.).

 

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Remerciement au Dr M. Atou pour sa collaboration.