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CHIRURGIE CARDIAQUE

ET

KINESITHERAPIE

. (Kinésithérapie Actualité , décembre 1994.)

J. CURRALADAS ( M.K)

C H U HENRI MONDOR.

CRETEIL.

 

 

Mots clés: REEDUCATION

CHIRURGIE CARDIAQUE

PRE- OPERATOIRE

  

POURQUOI UNE PREPARATION MASSO-KINESITHERAPIQUE?

Le bon déroulement de l'hospitalisation dépend de la capacité du patient à récupérer une cinétique ventilatoire acceptable afin d'améliorer ses gaz du sang et à sortir rapidement de réanimation. Or la majeur partie des patients méconnaissent totalement ce que l'on attend d'eux dans la phase post-opératoire immédiate; c'est à dire le désencombrement bronchique et la réharmonisation de leur cinétique ventilatoire.

Lors d'une intervention sur la cage thoracique ( sternotomie ), c'est une amputation de 30% de la Capacité Vitale immédiate et de 10 à 30% du Volume d'Expiration Maximale en une Seconde

( VEMS) par sidération diaphragmatique

qui est la cause d'une mauvaise gazométrie et des retards à l'extubation. On sait qu'un VEMS inférieur à 1000cm3 n'autorise pas une toux efficace d'où les risques d'encombrement mécanique et d'insuffisance respiratoire aiguë.

La prise en charge par une kinésithérapie préopératoire des patients de chirurgie cardio-thoracique ne peut qu'optimiser au maximum les conditions d'hospitalisation en les préparant physiquement et psychologiquement à leur intervention.

  

LA CHIRURGIE CARDIAQUE.

Trois catégories de malades bénéficient de la chirurgie cardiaque. La chirurgie réglée est la plus importante en nombre et comporte des pathologies coronariennes ou valvulaires diverses (Pontages Aorto-coronaires, Remplacements valvulaires aortiques,). La chirurgie d'urgence est la deuxième (pathologie infectieuses aortique ou péricardique, ). Le troisième groupe est constitué par la transplantation avec également une disparité en terme d'état général

pré-opératoire.

   

LA TECHNIQUE OPERATOIRE

La position du malade est le décubitus dorsal, un billot placé sous les omoplates et ne dépassant pas du thorax pour éviter la compression des nerfs radial et cubital. Les bras sont placés le long du corps, membres inférieur allongés.

L'abord chirurgical est effectué par une sternotomie médiane puis une incision verticale du péricarde.

Mise en place de la circulation extra corporelle

( C.E.C.) Après clampage aortique, la protection myocardique est assurée par l'hypothermie générale à 28° et perfusion de cardiolplégie dans la racine aortique. Mise en place de 4 drains supérieurs, (1 péricardique, 1 rétro sternal et 1 dans chaque plèvre.).

L'anesthésie générale nécessaire à une intervention cardiaque doit permettre une stabilité cardio-vasculaire la meilleure durant les différents stimuli nociceptifs. Pour ce faire, une analgésie puissante par hautes doses de morphiniques associés à des benzodiazépines est effectuée. Ceci entraîne la nécessite d'une surveillance en réanimation d'au moins 24 heures en raison de risques d'imprégnation morphinique tardive avec apnée.

 

EN REANIMATION

Le patient est endormi, intubé et ventilé artificiellement.

Il a des voies veineuses et artérielles, des seringues électriques avec des traitements immuno-dépresseurs ( transplanté ) , inotropes ,

 

anticoagulants. Les drains sont entres 2 et 4 ; rétro sternal, péricardique, pleuraux. Une sonde urinaire est mise en place. Le patient est sous surveillance permanente.

Le réveil s'effectue environ 12 heures après. Le patient est mis en aide inspiratoire puis selon sa tolérance sur pièce en T avec 3 litres d'O2 . L'extubation à lieu le plus vite possible d'après les éléments suivants;

PCO2 < 45 mm.hg ,

PO2 > 75 mm.hg sous 3 l d'O2 nasale

Une fréquence respiratoire < 3O cycles / minute.

Un bon état de conscience, le patient étant réveillé..

L'ablation des drains s'effectue à la 48ème heure si le saignement est tari.

 

 

LES CONSEQUENCES POST-OPERATOIRE:

LA PERTURBATION IMPORTANTE DE LA CINETIQUE VENTILATOIRE.

A cause de:

- la douleur évidemment présente et consécutive à l'ouverture de la cage thoracique

( sternotomie ) et à la présence des drains

( 8mm de diamètre ) pénétrant au niveau de l'appendice xiphoïde.

 

- des sub-luxations des articulations costo-vertébrales inévitables de part la sternotomie.

 

- la sidération diaphragmatique due, d'une part à la technique opératoire ( cryogénisation du médiastin ) et donc une perturbation du passage de l'influx dans les nerfs phréniques , d'autre part à la présence des drains traversant le diaphragme au niveau de son insertion antérieure, sternale, enfin à la position décubitus pendant les premières heures en réanimation, position rendue nécessaire pour les différents bilans et prises de constantes de surveillance par les infirmières. Cette position, surtout chez les patients obèses ou hypotoniques, ne favorise pas le fonctionnement du diaphragme et augmente sa fatigue en l'obligeant à repousser les viscères abdominaux pour effectuer son travail.

Cette dysfonction diaphragmatique modérée est observée dans les suites post opératoires immédiates et partiellement régressive à J8.

 

- l'anesthésie ( endormissement et dépression respiratoire par inhibition de l'automatisme respiratoire et le réflexe de déglutition et de toux.).

 

LA PERTURBATION DES ECHANGES GAZEUX

 

-Hypoxie, hypercapnie

-Présence d'atélectasies consécutives à la sidération diaphragmatique et à la C.E.C , les poumons n'ayant pas fonctionné pendant le temps de l'intervention , et malgré le "nettoyage" par aspiration endo-trachéale post-opératoire, il peut persister des zones non ventilées , notamment aux bases pulmonaires. La paresse diaphragmatique entretient ces phénomènes.

-Le patient ventile à minima, très superficiellement, avec un épanchement pleural possible qui peut être la conséquence d'un phénomène inflammatoire local , d'une insuffisance de drainage du réseau lymphatique par la diminution importante de la cinétique thoracique ou bien ,chez les transplantés , de l'hyper volémie liée chez ces patients à l'insuffisance ventriculaire droite transitoire

( défaillance temporaire du greffon ou hyper tension de l'artère pulmonaire préopératoire) avec remplissage nécessaire afin de maintenir un débit cardiaque convenable.

 

L' HYPERSECRETION BRONCHIQUE

Par l'arrêt du mouvement muco-cilliaire per-operatoire, en fonction de la durée de la ventilation artificielle et de l'état pulmonaire pré opératoire.( fumeurs, B.P.C.O, ).

 

 

lE TRAVAIL DU KINESITHERAPEUTE EN POST OP.

 

-une kinésithérapie respiratoire efficace quel que soit le mode de ventilation du patient

( respiration spontanée ou sous ventilateur mécanique ). Car le bon état respiratoire conditionnera l'apport d'O2, donc une bonne gazométrie artérielle, critère essentiel de l'extubation et du temps de séjour en réanimation. La kinésithérapie respiratoire nécessite absolument une bonne compréhension et une coopération du malade. Elle consistera en:

 

Le désencombrement; d'emblée si nécessaire par la toux ou l'aspiration trachéale en cas d'encombrement bronchique très important.

On pratiquera l'accélération du flux expiratoire ( A.F.E ) pour faciliter la remontée et l'évacuation des sécrétion bronchiques et éviter la toux afin de limiter la douleur et l'hyper pression thoracique qui augmente les contraintes sur le médiastin et la sternotomie. C'est l'expiration glotte ouverte ou "buée" , difficile à faire exécuter aux patients non préparés a cette technique. Brève et à haut volume pulmonaire afin de dégager la partie supérieure des vois aériennes. L'hypotonie abdominale, la sidération diaphragmatique et l'état préopératoire des patients sont des handicaps sérieux à cette manœuvre.

 

La ventilation dirigée; Par des exercices volontaires et dirigés par le M.K , elle permet, en travaillant dans le volume de réserve expiratoire (V.R.E ) et la capacité résiduelle fonctionnelle ( CRF ) d'améliorer les échanges au niveau de la barrière alvéolo-capillaire en renouvelant le mélange gazeux dans les secteurs distaux du poumon. Elle est associée à des stimulations manuelles, vibrations, pressions, étirements musculaires, prises et contre prises en fonction de la physiologie costale , changements de position, mais le latéro-cubitus strict est a déconseiller dans les premiers jours a cause de la sternotomie.

Les manœuvres s'effectuent toujours sur le temps expiratoire ( diminution de la pression intra bronchique et intra alvéolaire , moment de relâchement, de détente permettant une contraction diaphragmatique plus efficace par augmentation de sa course).

Le travail du diaphragme a ce stade est difficile a cause des drains pénétrant dans le médiastin et de

sa sidération .Celui-ci est souvent en pré-opératoire en insuffisance fonctionnelle passive

( position inspiratoire) par la surcharge pondérale et les modifications morphologiques thoraciques

( BPCO ) .En post-opératoire, il est repoussé vers le haut dans la position décubitus stricte et doit repousser les viscères pour effectuer sa course. Enfin , il doit en plus souvent lutter contre une pression expiratoire positive (PEP) intrinsèque pour déclencher une inspiration efficace. L'hypotonie abdominale associée à la méconnaissance de la ventilation abdomino-diaphragmatique est un handicap majeur. Malgré tout ,le travail du diaphragme et la ventilation costale basse sera recherchée constamment.

 

L'expectoration dirigée en maintenant le sternum ( douleur ) par un appui et les abdominaux par un contre appui conséquent pour que la toux soit efficace( hypotonie des abdominaux.) .On éduquera le patient à maintenir le plus rapidement possible son thorax dans les efforts de toux.

Une kinésithérapie fonctionnelle avec lever précoce vers j 4 après la sortie de réanimation de façon a redonner des habitudes gestuelles perdues depuis quelques semaines, voire depuis plus longtemps, et faciliter les grandes fonctions indispensables à une vie normale; reprise du transit, amélioration de la cinétique ventilatoire et facilitation du travail diaphragmatique.

 

LES MOYENS DU KINE EN PRE OP.

La majeur partie des individus ont une méconnaissance totale des mécanismes ventilatoires, il suffit d'une surcharge pondérale et d'un passé souvent récent de tabagique pour perturber ce mécanisme. Cette méconnaissance de leur schéma corporel et de la respiration abdomino-diaphragmatique ajoutée au stress de l'intervention augmente les douleurs et les risques de complications pulmonaires par la toux répétitive et inefficace et peut retarder la reprise d'une activité normale ( marche ) .

Ces moyens doivent être mis en œuvre dès la pose de l'indication d'intervention chirurgicale et la prescription de séances de kinésithérapie pré opératoire doit faire partie de l'arsenal thérapeutique du praticien. Chez les insuffisants respiratoires chroniques obstructifs dont les poumons sont distendus: le but principal

de la ventilation dirigée est de réintégrer le diaphragme dans son rôle de générateur de dépression, vecteur d'une ventilation des bases pulmonaires.

Il est bien entendu que cet objectif ne peut être fixé que lorsque la morphologie, la mobilité du diaphragme et de la cage thoracique permettent encore une rééducation abdomino-diaphragmatique.Il nous faut donc apprendre aux candidats a cette chirurgie a mieux contrôler le couple abdomino-diaphragmatique par une prise de conscience corporelle pré-operatoire.

Les exercices visent à diminuer le volume résiduel et contribuent ainsi à replacer le diaphragme dans des conditions mécaniques propices pour recréer une respiration abdomino-diaphragmatique. Celle-ci permet alors une dépression pleurale satisfaisante susceptible d'assurer une ventilation plus efficace des bases pulmonaires .

Cette rééducation débute par des exercices visant à augmenter activement le volume expiré. Cette expiration est suivit d'une inspiration- relâchement "passive". Puis l'inspiration devient active et contrôlée sur un diaphragme placé préalablement dans une position pré inspiratoire satisfaisante.

 

le traitement masso-kinesitherapique doit donc aller dans trois directions:

-Gymnique.

-Respiratoire.

-Relaxation.

Il sera bien sur accompagné de conseils d'hygiène de vie ( arrêt du tabac, perte de poids si besoin , régime alimentaire équilibré.)

 

La prescription:

5 à 10 séances de rééducation préopératoire

Désencombrement et apprentissage de la respiration abdomino-diaphragmatique.

Mobilisation des membres supérieurs et de la cage thoracique.

 

Le protocole de rééducation préopératoire préconisé:

 

1) Travail gymnique des membres supérieurs

Etirements des pectoraux, mobilisation de la ceinture scapulaire et de la cage thoracique, travail en ouverture de la cage thoracique.

Assouplissement costo vertebral.

2) Apprentissage de la respiration diaphragmatique et de l'Accélération du Flux Expiratoire par la ventilation dirigée. Acquisition d'une expectoration efficace.

3) Introduction de la notion de détente

( initiation a la relaxation) lors de la respiration diaphragmatique.

 

Bibliographie.

P. Sadoul, N. Delorme, N. Sadoul

Evaluation préopératoire du risque respiratoire.1986 Masson.Paris

O. Bastien

Base de la chirurgie cardiaque.1993 Lyon

Jl Diehl, F. Lofaso, P. Deleuze , D. Touchard , F. Lemaire , L. Brochard.

Etude de la fonction diaphragmatique après chirurgie cardiaque.

Réanimation urgence, 20 , 22 janvier 94

D. Delplanque, M. Antonello, E.Corriger

Kinésithérapie et Réanimation respiratoire . 1994 Masson .Paris.

J. Curraladas

La kinésithérapie dans la prise en charge précoce des patients ^porteurs d'une nouvelle technologie: Le Baxter Novacor.

Cahiers de kinésithérapie 1994 Masson. Paris

 

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